Le droit d’alerte du CSE en cas d’atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles

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Femme se couvrant le visage avec les mains, exprimant la détresse.

En tant qu’instance unique de représentation des salariés, le comité social et économique (CSE) dispose de plusieurs droits d’alerte pour signaler des situations graves. Dans cet article, retrouvez tout ce qu’il faut savoir sur le fonctionnement du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes.

Qu’est-ce que le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes ?

Définition

Le droit d’alerte est un moyen pour le comité social et économique (CSE) de signaler des situations préoccupantes. Il s’agit d’un outil efficace pour faire valoir les droits des salariés de l’entreprise.

Le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles concerne les relations professionnelles et notamment les situations de conflits professionnels dans l’entreprise.

Ainsi, lorsqu’un élu du CSE a connaissance d’une situation qui présente une atteinte aux droits des personnes, à la santé physique et mentale des salariés ou à leurs libertés individuelles, il doit immédiatement prévenir l’employeur pour déclencher le droit d’alerte (Article L2312-59 C.Trav.).

Qui peut déclencher le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes ?

Tous les CSE, quel que soit l’effectif du CSE et de l’entreprise, peuvent faire usage du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes (Article L2312-5 C.Trav.).

Seuls les membres de la délégation du personnel au CSE peuvent saisir l’employeur pour faire valoir officiellement leurs droits d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes. Toutefois, tout salarié de l’entreprise qui constate une situation sensible peut prévenir un élu afin que ce dernier avertisse l’employeur de la situation.

Certains salariés, tels que les représentants de proximité, le référent harcèlement et les membres des différentes commissions du CSE, ont une place privilégiée pour détecter ce type de situation et avertir les élus du CSE.

Dans quels cas utiliser le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes ?

On peut diviser l’atteinte aux droits des personnes en trois catégories :

  • Le harcèlement moral,
  • Le harcèlement sexuel,
  • Les discriminations.

Ces atteintes au droit des personnes constituent des risques psychosociaux (RPS) pour les salariés qui en sont victimes.

En effet, les RPS représentent un ensemble de risques qui affectent la santé physique et mentale des salariés. Parmi les facteurs de risque psychosociaux on retrouve principalement :

  • les violences internes à l’entreprise (harcèlement moral, harcèlement sexuel, discrimination, conflit interne, etc.) ;
  • le stress (surcharge de travail, surveillance excessive, manque d’explications, manque de moyens, etc.) ;
  • les violences externes à l’entreprise (notamment dans les postes au contact du public où les travailleurs sont exposés aux insultes, harcèlement, menaces, agressions, etc.).

Par ailleurs, en plus de revêtir une importance capitale pour la santé des travailleurs, le psychisme et le relationnel des salariés sont des éléments essentiels pour le bon fonctionnement de l’entreprise.

 ℹ Notez-le : Les RPS existent de façon intrinsèque à certains types de métiers tels que le travail de nuit, les postes bruyants, le travail en contact avec le public, etc.

Ainsi, les élus de la délégation du personnel au CSE doivent être attentifs aux relations entres les travailleurs afin de pouvoir déterminer lorsqu’une situation représente un cas de harcèlement ou de discrimination.

🔎 Focus : Pour rappel, le CSE peut proposer toutes mesures que les élus jugent nécessaires pour lutter contre le harcèlement moral ou sexuel (Article L2312-9 C.Trav.).

Au-delà du rôle du CSE dans le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes, il existe une réglementation spécifique pour le harcèlement moral et sexuel qui prévoit :

Toutes ces actions peuvent être mises en place à la suite de l’alerte d’un élu du CSE. Ainsi, à travers le droit d’alerte, le CSE joue un rôle important de prévention contre le harcèlement en entreprise.

Harcèlement moral

Selon le Code du travail, le harcèlement moral est constitué par des faits qui dégradent les conditions de travail d’un salarié en portant atteinte (Article L1152-1 C.Trav.) :

  • à ses droits et à sa dignité ;
  • à sa santé physique ou mentale ;
  • à son avenir professionnel.

Exemples : dénigrement du travail, humiliation publique, agressivité, tâches dévalorisantes, mesures injustifiées, dépassement des tâches, etc.

Harcèlement sexuel

Selon le Code du travail, le harcèlement sexuel se caractérise par le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste, qui (article L1153-1 C. trav.) :

  • portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant,
  • ou créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

Par ailleurs, est également assimilée au harcèlement sexuel toute forme de pression grave (même non répétée) dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte sexuel, au profit de l’auteur des faits ou d’un tiers.

Exemples : demandes de relations sexuelles en échange d’une faveur ou d’un avantage, contact physique inapproprié ou non désiré, remarques sexualisées, plaisanteries de natures sexuelles, propos sexuels inappropriés, etc.

🔎 Focus : Le CSE dispose d’un référent harcèlement chargé de la prévention contre le harcèlement sexuel dans l’entreprise (Article L2314-1 C.trav.). Pour plus d’informations sur ce sujet, n’hésitez pas à consulter notre article dédié.

Discrimination

Le Code du travail défini la discrimination comme des faits compromettant la carrière professionnelle d’un travailleur et commis en raison de ses caractéristiques personnelles. Ces faits peuvent notamment être commis en raison de l’origine du travailleur, de son appartenance à une ethnie ou à une religion, de son sexe ou son orientation sexuelle, etc. (Article L1132-1 C.Trav.).

La discrimination dans le milieu professionnel concerne notamment l’embauche, la rémunération, les sanctions et l’organisation du travail d’un salarié.

Exemple : refus d’embauche d’une femme qui souhaite avoir une famille, refus d’embauche d’un travailleur à cause de sa religion, etc.

Comment utiliser le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes ?

La procédure du droit d’alerte en cas d’atteinte au droit des personnes

La procédure du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes se divise en 4 étapes :

  1. Déclenchement du droit d’alerte,
  2. Enquête de l’employeur et du CSE
  3. Saisie du conseil de prud’hommes (CPH)
  4. Mise en place de mesures.

1 – Un élu du CSE doit prévenir l’employeur de la situation

Lorsqu’un élu a connaissance d’une situation portant atteinte aux droits des personnes ou aux libertés individuelles, il doit en prévenir l’employeur. Tout salarié témoin d’une telle situation peut en avertir le CSE.

Lorsqu’un élu est mis au courant de la situation, il est préférable que ce dernier en fasse part aux autres membres du CSE avant d’enclencher le droit d’alerte.

Il est conseillé d’informer l’employeur par écrit afin de pouvoir garder une trace de l’échange, ceci dans un souci de transparence et en cas de litige futur.

2- L’employeur doit obligatoirement procéder à une enquête sur la situation avec le membre de la délégation du personnel au CSE (Article L2312-59 C.Trav.).

Cette enquête doit être menée sans délai à compter du moment où l’employeur a eu connaissance de la situation.

Il n’existe pas de dispositions particulières sur le déroulement de l’enquête. Néanmoins, un membre du CSE doit y participer et peut donc veiller à ce que celle-ci se déroule de façon convenable.

Il est conseillé de faire intervenir tous les protagonistes de la situation ainsi que les responsables, de retracer les faits sans jugement et de rédiger un compte-rendu de l’enquête signé par l’employeur et l’élu du CSE.

Enfin, il peut découler de cette enquête la mise en place de mesures afin que la situation s’améliore et ne se reproduise pas.

3- Saisir le conseil de prud’hommes

Lorsque l’employeur n’a pas mené l’enquête obligatoire, qu’il existe une divergence sur la réalité de l’atteinte ou encore qu’aucune solution n’est trouvée avec l’employeur, le salarié ou le membre du CSE peuvent saisir le conseil de prud’hommes.

⚠️ Attention : Si le membre du CSE décide seul de saisir les prud’hommes, le salarié intéressé doit être averti par écrit et peut s’opposer à cette saisine (Article L2312-59 C.Trav.).

4- Respect des mesures propres à faire cesser cette atteinte

À la suite de la saisine du conseil de prud’hommes, le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser l’atteinte dont a été victime le travailleur. Les membres du CSE peuvent ensuite veiller à ce que ces mesures soient effectivement respectées dans l’entreprise.

Exemples d’utilisation du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes

Voici quelques exemples de cas concret de jurisprudences sur le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes :

A contrario, ne justifient pas l’exercice d’un droit d’alerte :

À retenir concernant le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droit des personnes

  • Tous les CSE peuvent faire usage du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes ;
  • L’atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles présente des risques psychosociaux ;
  • La procédure du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes comprend une enquête ainsi qu’un éventuel jugement devant le conseil des prud’hommes.