Le référent harcèlement au CSE : ce qu’il faut savoir

Table des matières
Un homme harcèle une femme en posant sa main sur son épaule.

Le référent harcèlement au CSE est un membre du CSE chargé de lutter contre le harcèlement sexuel dans l’entreprise. Dans cet article, retrouvez tout ce qu’il faut savoir sur cet acteur essentiel de la lutte contre le harcèlement sexuel en entreprise.

Quel est le rôle du CSE en matière de lutte contre le harcèlement sexuel ?

Qu’est-ce que le référent harcèlement au CSE ?

Le référent harcèlement est un membre de la délégation du personnel au CSE chargé de lutter contre le harcèlement sexuel dans l’entreprise.

Le rôle du CSE, dans sa mission de représenter les salariés, a aussi des prérogatives en matière de santé et sécurité au travail. Le CSE constitue en effet un acteur essentiel dans la lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes en entreprise (article L2312-5 C. trav.).

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, outre ses missions liées à la santé, la sécurité et aux conditions de travail, le CSE est en mesure de susciter des actions de prévention du harcèlement sexuel et des agissements sexistes (article L2312-9 C. trav.). L’employeur n’est pas obligé d’accepter ces propositions mais ce refus doit être motivé.

Dans ces mêmes entreprises et dans le cadre de ses attributions en matière de santé, de sécurité et de condition de travail, le CSE doit participer à l’analyse des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs et intégrer le harcèlement sexuel à celle-ci.

Le référent harcèlement est donc au centre de la lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes menée par le CSE. C’est à lui que doivent se rapporter les propositions d’actions de lutte contre le harcèlement ainsi que tous les problèmes liés au harcèlement dans l’entreprise. Il est à la fois l’interlocuteur privilégié des responsables de l’entreprise sur les sujets liés au harcèlement sexuel et celui des victimes de faits de harcèlement.

Quand désigner un référent harcèlement au CSE ?

Depuis le 1er janvier 2019, tous les CSE doivent désigner un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes (article L2314-1 C. trav.). La désignation d’un référent harcèlement est par conséquent obligatoire dès que la mise en place du CSE est obligatoire, autrement dit dans toutes les entreprises d’au moins 11 salariés.

Comment désigner un référent harcèlement au CSE ?

La désignation du référent harcèlement au CSE se fait sous la forme d’une résolution adoptée à la majorité des membres présents.

Des modalités spécifiques de désignation du référent harcèlement peuvent toutefois être définies par accord d’entreprise ou par le règlement intérieur du CSE. Il peut s’agir d’un vote par bulletin secret ou d’un vote électronique, mais le vote à main levée lors d’une réunion plénière est généralement favorisé.

Afin de favoriser une mise en place rapide du référent harcèlement, il est recommandé d’effectuer cette désignation lors de la première réunion du CSE car il s’agit d’une réunion plénière en début de mandat.

Contexte sociétal

La création du CSE et l’entrée en vigueur de l’obligation d’avoir un référent harcèlement au sein du CSE s’inscrivent dans un contexte sociétal bien particulier.

En effet, en 2017, à la suite de nombreuses affaires de harcèlement sexuel et d’agissements sexistes à travers le monde, le mouvement social #Metoo a connu un essor particulier et a ainsi permis de libérer la parole des victimes de harcèlement sexuel et notamment dans le monde de l’entreprise.

Dans ce contexte, il est apparu comme particulièrement important de mettre la lutte contre le harcèlement sexuel et sexiste au cœur des préoccupations de l’entreprise.

Qu’est-ce que le harcèlement sexuel en entreprise ?

Quelle est la définition juridique du harcèlement sexuel en entreprise ?

Le harcèlement sexuel en entreprise est caractérisé par des faits, des actions ou des propos à connotation sexuelle ou sexiste et par des actes qui ont pour but d’obtenir un acte de nature sexuelle.

Pour être plus précis, le Code du travail considère comme du harcèlement sexuel (article L1153-1 C. trav.) :

  • toutes les actions répétées constituées par des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste envers une personne ;
  • toutes les actions, même non répétées, constituées par des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste venant de plusieurs personnes envers un même salarié ;
  • toutes les actions, même non répétées, exercées dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle.

On peut noter que le Code du travail distingue donc les propos à connotation sexuelle ou sexiste et les actions exercées dans le but d’obtenir ou d’imposer un acte de nature sexuelle. Ces deux types d’agissements sont considérés comme du harcèlement sexuel.

À noter que le Code pénal va plus loin en condamnant d’outrage sexuel ou sexiste tous les faits de harcèlement sexuel exercés sur des personnes en position de vulnérabilité. Cette notion est notamment applicable lorsque de tels faits ou de tels agissements sont commis par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions (article 222-33-1-1 C. pén.).

💡 La réglementation en matière de lutte contre les violences sexuelles et sexistes et contre le harcèlement sexuel a beaucoup évolué ces dernières années. On peut notamment citer la loi du 2 août 2021 qui a fait évoluer la définition du harcèlement sexuel en modifiant notamment l’article L. 1153-1 du Code du travail qui inclut, depuis le 31 mars 2022, la notion de comportement à connotation sexiste dans le harcèlement sexuel.

La jurisprudence a par ailleurs permis d’élargir et de préciser la notion délicate et parfois ambigüe du harcèlement sexuel en statuant sur certains cas complexes :

  • les faits de harcèlement sexuel sont également condamnés même s’ils n’ont pas lieu sur le lieu de travail ou sur le temps de travail (Cass. soc., 11 janvier 2012, n° 10-12.930). Ce type de situation, qui peut être fréquent dans le cadre de relations professionnelles (déplacement professionnel, sortie de bureau, etc.), n’exempt pas les agresseurs d’une condamnation.
  • s’il est avéré que la victime de harcèlement sexuel a adopté une aptitude et une relation ambigüe avec l’agresseur en participant par exemple à un jeu de séduction, la qualification de harcèlement sexuel peut être levée (Cass. soc, 25 septembre 2019, n° 17-31.171) ;
  • lorsque le harcèlement sexuel implique également du harcèlement moral, l’agresseur s’expose à des peines pour ces deux faits cumulés (Cass. soc, 23 septembre 2008, n° 07-42.920).

💡 Le harcèlement sexuel peut conduire un salarié à l’inaptitude au travail. En effet, il arrive que la victime de harcèlement présente un syndrome dépressif à la suite de tels agissements lui empêchant d’exercer son travail. Il est néanmoins nécessaire que le lien entre la maladie de la victime et les faits de harcèlement soit avéré (Cass. soc., 3 mars 2009).

Quelles sont les obligations réglementaires de l’employeur en matière de lutte contre le harcèlement sexuel ?

Mesures et prévention du risque de harcèlement sexuel

Le harcèlement sexuel fait partie des risques professionnels en entreprise (article L4121-2 C. trav.).

Par conséquent, la prévention du risque de harcèlement sexuel dans l’entreprise doit être intégrée au document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) (article L4121-3 C. trav.). Rappelons que le CSE et le référent harcèlement peuvent être consultés sur le DUERP et ses mises à jour.

Par ailleurs, selon les principes généraux de prévention des risques, l’employeur doit assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés (article L4121-1 C. trav.). Il doit par conséquent prévenir les risques de harcèlement sexuel à travers des choix et des mesures concernant notamment l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales, les facteurs environnementaux, etc.

Outre la prévention du risque et les différentes mesures qui l’accompagnent, le Code du travail impose des mesures supplémentaires de lutte contre le harcèlement sexuel en entreprise :

  • affichage d’une information sur les dispositions pénales de l’article 222-33 relatives au harcèlement sexuel dans les locaux où se fait l’embauche(article L1153-5 C. trav.). Cette information doit préciser les numéros d’aide en cas de harcèlement sexuel définis à l’article D1151-1 C. trav. ;
  • information des victimes de harcèlement sexuel sur les dispositions pénales de l’article 222-33 relatives au harcèlement sexuel ainsi que les numéros d’aide en cas de harcèlement sexuel ;
  • création ou adhésion à un service de prévention et de santé au travail (article L4622-2 C. trav.) ;
  • le règlement intérieur de l’entreprise doit rappeler les dispositions relatives au harcèlement sexuel et aux agissements sexistes (article L1321-2 C. trav.) ;
  • dans les entreprises d’au moins 250 salariés, un référent harcèlement d’entreprise doit être désigné (article L1153-5-1 C. trav.).

Le référent harcèlement d’entreprise, obligatoire depuis le 1er janvier 2019, ne doit pas être confondu avec le référent harcèlement du CSE. En effet, même s’ils disposent de missions similaires, le référent harcèlement d’entreprise ne dispose pas des mêmes moyens et protection que le référent harcèlement au CSE. Il n’a pas non plus vocation à représenter les salariés.

Gestion du harcèlement sexuel dans l’entreprise

En plus de prendre toutes les dispositions nécessaires pour prévenir les faits de harcèlement sexuel, l’employeur est chargé d’y mettre un terme et de les sanctionner (article L1153-5 C. trav.).

À ce titre, il dispose d’un délai de deux mois pour engager des poursuites disciplinaires contre un salarié à l’origine de faits de harcèlement sexuel (sauf si les faits fautifs ont donné lieu, dans ce délai, à des poursuites pénales) (article L1332-4 C. trav.).

💡 Le Ministère du travail a mis à disposition des entreprises un Guide de lutte contre harcèlement sexuel.

Tout salarié ayant procédé à des faits de harcèlement sexuel s’expose à une sanction disciplinaire de la part de l’employeur (article L1153-6 C. trav.). Pénalement, le harcèlement sexuel est passible d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende (article 222-33 C. pénal.). Cette peine s’élève à trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende lorsque les faits sont commis par une personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions.

💡 Les victimes et témoins de harcèlement sexuel disposent d’une protection salariale comprenant notamment une impossibilité d’être licenciés (article L1153-2 C. trav.).

Enfin, les faits de discriminations commis à la suite d’un harcèlement sexuel sont passibles d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 3 750 € (article L1155-2 C. trav.).

Responsabilité de l’employeur

Étant donné que le harcèlement sexuel constitue un risque professionnel, la responsabilité civile ou pénale de l’employeur peut être engagée à la suite de faits de harcèlement dans son entreprise.

En effet, tout manquement aux dispositions du Code du travail relatives à la santé, la sécurité et les conditions de travail, même par simple méconnaissance, est passible d’une amende de 10 000 € (article L4741-1 C. trav.).

L’employeur est tenu d’une obligation de résultat en matière de protection de la santé, de la sécurité et des conditions de travail de ses salariés. Cela implique qu’il peut être mis en cause lors d’une affaire de harcèlement sexuel s’il s’avère qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires à la prévention de ce risque ou qu’il n’a pas agi pour mettre fin aux faits de harcèlement.

Quel est le rôle du référent harcèlement au CSE ?

Quelles sont les missions du référent harcèlement au CSE ?

Représentation du personnel

Au vu de l’importante réglementation en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et des enjeux que celle-ci soulève, le rôle du référent harcèlement dans l’entreprise est très large et revêt une importance particulière.

En effet, rappelons que le référent harcèlement est un élu à la délégation du personnel au CSE. Il doit donc représenter les salariés en plus de sa fonction de référent. Ces deux rôles se croisent et confèrent au référent harcèlement du CSE une position idéale dans la lutte contre le harcèlement sexuel en entreprise.

💡 Le règlement intérieur du CSE peut définir le périmètre des missions du référent harcèlement afin d’organiser au mieux la lutte contre le harcèlement sexuel. Aucune clause ne peut néanmoins le contraindre dans l’exercice de sa fonction.

Promouvoir la lutte contre le harcèlement sexuel

Dans un premier temps, la mission élémentaire du référent harcèlement est de veiller à promouvoir la lutte contre le harcèlement sexuel à travers différentes actions :

  • discuter de la lutte contre le harcèlement sexuel et la promouvoir auprès des salariés ;
  • informer le personnel de l’entreprise sur la lutte contre le harcèlement sexuel et les actions à mener dans ce sens dans l’entreprise ;
  • veiller à être au courant des situations présentant des risques de harcèlement sexuel.

Prévenir les risques de harcèlement sexuel

Dans un second temps, le référent harcèlement est un acteur majeur de la prévention contre le harcèlement sexuel en entreprise.

Pour réaliser cette prévention, il peut notamment :

  • proposer des actions de prévention à l’employeur ou aux différents responsables de l’entreprise ;
  • proposer des actions d’information ou de formation en matière de lutte contre le harcèlement sexuel dans l’entreprise ;
  • mener des enquêtes en cas de harcèlement au sein de l’entreprise (article L2312-5 C. trav.) ;
  • participer à l’analyse des risques professionnels (article L2312-9 C. trav.) ;
  • donner son avis sur le DUERP ainsi que sur la base de données économiques et sociales (BDES) pour mieux définir les risques de harcèlement dans l’entreprise ;
  • veiller au respect de la réglementation en matière de lutte contre le harcèlement sexuel par l’employeur.

Accompagner les victimes de harcèlement sexuel

En plus des nombreuses missions d’information et de prévention, le référent harcèlement doit être en mesure de gérer les faits de harcèlement sexuel dans l’entreprise en agissant comme un relais entre les salariés, l’employeur et les différents acteurs compétents. Il doit également pouvoir accompagner les victimes dans la gestion professionnelle et psychologique du problème.

Ce rôle se caractérise par des actions clés telles que :

  • alerter l’employeur et les ressources humaines des faits de harcèlement sexuel, en accord de l’intéressé ;
  • dans les entreprises de plus de 50 salariés, utiliser le droit d’alerte pour atteinte aux personnes pour des faits de harcèlement sexuel (article L2312-59 C. trav.) ;
  • saisir l’inspection du travail pour toutes plaintes et observations relatives à des faits de harcèlement sexuel (article L2312-5 C. trav.) ;
  • accompagner les victimes de harcèlement et les témoins, notamment dans les démarches à effectuer ;
  • mettre en relation les victimes avec les différentes aides (psychologue, médecin du travail, association, etc.) ;
  • analyser la situation et conseiller la victime et les témoins ;
  • agir en médiateur dans les cas de harcèlement sexuel avec l’accords des deux partis (article L1152-6 C. trav.) ou proposer un médiateur à même de pouvoir aider les deux parties à trouver une solution.

Quels sont les moyens mis à la disposition du référent harcèlement au CSE ?

Le référent harcèlement ne dispose pas de moyens particuliers pour l’exercice de cette fonction. En revanche, tous les moyens qui lui sont alloués en tant que membre élu de la délégation du personnel au CSE peuvent être mis à profit pour assurer son rôle de référent.

Formation du référent harcèlement

Les membres du CSE bénéficient de la formation ssct nécessaire à l’exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (article L2315-18 C. trav.). À ce titre, le référent harcèlement peut bénéficier d’une formation particulière en matière de lutte contre le harcèlement sexuel en entreprise.

Heures de délégation du référent harcèlement

Le référent harcèlement ne dispose pas d’heures de délégation pour l’exercice de cette fonction. Il dispose néanmoins des heures de délégation qui lui sont allouées en tant que membre du CSE (article R2314-1 C. trav.).

Il peut donc utiliser ces heures de délégation en fonction des besoins de l’entreprise en matière de lutte contre le harcèlement sexuel en entreprise. Si nécessaire, un accord d’entreprise peut prévoir des heures de délégation supplémentaires et notamment lorsqu’un membre du CSE cumule plusieurs fonctions.

Collaboration avec différents acteurs de l’entreprise

Dans la gestion d’un fait de harcèlement sexuel et pour la prévention de celui-ci, le référent harcèlement peut faire appel à plusieurs acteurs pour l’aider dans sa mission.

En effet, la gestion d’un fait de harcèlement doit faire intervenir, avec l’accord de la victime, le maximum de personnes compétentes pour régler ce problème.

Voici une liste non-exhaustive des différents intervenants à la disposition du référent harcèlement :

  • le médecin du travail ;
  • l’inspection du travail ;
  • les responsables de l’entreprise ;
  • le psychologue d’entreprise ; 
  • le médiateur s’il existe par l’accord des deux parties ;
  • le référent harcèlement d’entreprise.

Le référent harcèlement dispose également de l’aide du CSE et de ses différentes commissions. La commission santé, sécurité et condition de travail (CSSCT) peut notamment aider le référent harcèlement dans sa tâche et notamment grâce aux travaux qu’elle conduit. Il est recommandé que le référent harcèlement soit membre de la CSSCT afin de pouvoir conduire au mieux l’amélioration des conditions de travail dans l’entreprise et notamment en matière de lutte contre le harcèlement sexuel.

Le statut du référent harcèlement

Toujours grâce à son statut de membre du CSE, le référent harcèlement dispose d’avantages et de possibilités qui lui permettent d’exercer plus aisément son rôle de référent :

Conclusion

En tant que représentant du personnel, le référent harcèlement occupe une place privilégiée dans la lutte contre le harcèlement sexuel en entreprise. Sa position lui confère une certaine liberté d’action pour mener à bien ses missions et offre aux salariés de l’entreprise un interlocuteur pour les faits de harcèlement sexuel.

Le référent harcèlement reflète l’évolution de la société et du droit social en s’inscrivant dans une réglementation en faveur de la lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes en entreprise.